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Evariste Combary, journaliste culturel à la RTB

«Il n’y a pas un artiste burkinabè qui est plus riche que moi»

Son nom ne passe pas inaperçu dans le milieu culturel au Burkina. Journaliste à la Radio télévision nationale, Evariste Combary, puisque c’est de lui qu’il s’agit, dans cette entrevue qu’il a accordée à L’Obs. Dim présente davantage l’émission Scène à la RTB dont il est l’animateur. Sans ambages, il n’hésite pas à parler également de ses relations avec les artistes et le monde du showbiz burkinabè. Lisez plutôt.

Comment se porte Evariste Combary ?

Il y a la pression ; au service, comme chez tout le monde, mais je me porte bien. Il y a la santé.


Peux-tu te présenter pour ceux qui voudraient mettre davantage de mots sur ton visage ?

(Rires). C’est difficile de se présenter soi-même. Je me nomme Evariste Yemboado Combary, je suis journaliste à la télévision nationale du Burkina. Dans mon travail, je m’intéresse particulièrement à la culture.

Comment es-tu arrivé à la télévision nationale et particulière dans le domaine de la culture ?

Tout d’abord, j’ai fait mes études au département Arts et communication à l’université de Ouagadougou. Dès la première année, un de nos enseignants, Mahamoudou Ouédraogo, qui était à l’époque directeur de la télévision nationale (Ndlr : ancien ministre de la Culture), nous a informés qu’on cherchait des pigistes pour la chaîne. J’ai fait le test et j’ai été retenu parmi les 2 candidats qu’on voulait. Après, j’ai été informé que c’est une personne qui sera retenue. Je n’en ai pas fait de problème, car je me suis dit intérieurement que ça ne pourrait m’échapper si c’était ma place là-bas. Plus tard, à la fin de la troisième année d’études, on m’a rappelé et c’est ainsi que j’ai intégré la télévision nationale. A mes débuts, j’étais à la réalisation comme assistant. A un moment, suite au départ de certains aînés, on m’a proposé d’intégrer la rédaction et j’ai accepté. Pour ce qui concerne le domaine de la culture, il faut dire que nous étions les plus jeunes à cette époque et on touchait à tout, même si je suis beaucoup plus sportif dans l’âme. Les reportages culturels étant à majorité de nuit, ça intéressait très peu les journalistes. Je me suis toujours dit que j’apprenais, donc pour moi, il n’y avait pas de problème. Plus tard, le directeur Yacouba Traoré a proposé qu’on réfléchisse ensemble pour créer quelque chose. C’est ainsi que Scène, qui lui revient d’ailleurs, est née ; c’est lui le véritable géniteur de cette émission.

Parlant de cette émission, Scène, peux-tu la présenter à ceux qui ne la connaissent pas jusque-là ?

Scène est une émission culturelle mensuelle qui existe depuis près de 10 ans. Elle concerne principalement la danse, la musique, le théâtre, le cinéma, les portraits d’artistes ou de promoteurs culturels, les manifestations, etc. L’objectif de cette émission, de 52 minutes, est de permettre aux téléspectateurs de découvrir davantage les différents pans des disciplines culturelles citées ci-dessus.

Quelles sont les contraintes liées à Scène ?

Il faut reconnaître qu’avec le temps ça va. Le plus dur, c’était de trouver une équipe pour aller sur le terrain. Au début, avec une direction qui avait une certaine vision de la culture, il y avait un certain dynamisme pour accompagner les évènements culturels, même si par moments, il fallait faire face aux ressentiments de certaines personnes. Ce qui a permis un phénomène de routine chez certains cameramen et chauffeurs. Donc, pour le plan national, il n’y a pas de contraintes majeures. Cependant, quant il s’agit d’aller à l’international, il n’y a pas d’accompagnements ; c’est toujours avec nos propres moyens. Pourtant, nous aspirons à faire grandir l’émission. Il faut noter que mon travail de journaliste ne me l’impose. On ne pourra pas me blâmer si j’arrête Scène. C’est une production, et qui dit cela dit de la création qui nécessite donc de la réflexion. Tout travail a un prix. Malheureusement, il n’y a aucune mesure dans ce sens pour ce qui concerne Scène. Vous voyez, là aujourd’hui (Ndlr : l’entretien a eu lieu un samedi) que je suis en pleine préparation de l’émission, même si c’est le jour de repos de certaines personnes. C’est parce qu’on aime tout simplement qu’on est dedans.

Comment se fait le choix des artistes ou des activités culturelles pour Scène ?

Je suis les différentes chaînes de télévisions et l’actualité culturelles comme tout le monde. Nous mettons l’accent sur le côté atypique de l’artiste ou sur ceux qui ont une certaine étoffe. Pour les manifestations culturelles, il nous faut un dossier pertinent que nous étudions, le reste se fait sur la disponibilité de l’équipe.

On taxe certains animateurs ou journalistes culturels de faire du favoritisme avec les artistes ou les promoteurs qui, comme on le dit dans le jargon, mouillent leur CD ou déposent des pierres sur leurs dossiers ; qu’en est-il à la RTB et pour ce qui te concerne ?


Je vais parler pour ce qui concerne ma personne. L’émission Scènen’est pas payante. Je défie quiconque avec qui j’ai pris de l’argent pour l’émission qu’il le dise. Quand par-dessus tout, après l’enregistrement quelqu’un invite l’équipe à prendre un pot ou donne un cadeau, nous le partageons équitablement. Et je tiens toujours informé la direction en fonction de la valeur. Ce serait malhonnête d’utiliser le matériel de l’Etat pour aller prendre de l’argent chez des gens. L’émission est gratuite. Ceux qui ont du talent vont toujours passer et on ne m’impose personne. Certains vont même jusqu’à voir certains responsables mais ça ne marche pas. D’ailleurs, j’exige beaucoup plus de professionnalisme de la part des artistes. Vous imaginez que des artistes sortent même leurs œuvres par exemple sans que plusieurs journalistes culturels, qui sont censés les accompagner, ne les aient pas.

Cependant quelles sont vos relations, en tant que journaliste culturel, avec les artistes ?

Je n’ai jamais eu de problème avec un artiste, car il y a une certaine marge que je respecte toujours. J’ai des amis artistes mais la marge est toujours respectée. Je respecte l’artiste et j’exige de même.

Dans le milieu culturel, notamment celui du show-biz, beaucoup de personnes trouvent qu’Evariste Combary est réservé ; pourquoi ont-ils cette impression ?


(Rires). C’est dans ma nature. Ceux qui ne me côtoient pas croient toujours que je suis trop réservé. Non ce n’est pas le cas. Je fonctionne comme un miroir. Très souvent quand je vais dans certains évènements ou des manifestations culturelles, c’est pour travailler. Aussi, je suis les choses de loin. Parce qu’à trop s’y frotter on devient vulgaire. J’accompagne les artistes et le monde culturel dans la mesure du possible. Un artiste qui me contacte pour un évènement ne paie jamais un rond si une équipe doit le couvrir. J’informe toujours ma hiérarchie en conférence de rédaction. Malheureusement, les gens ne s’intéressent pas trop à la culture. Ils disent qu’il n’y a pas d’argent, que les artistes sont ingrats, etc. Les artistes burkinabè ne sont pas riches. Qu’ils m’excusent, mais j’ai dit une fois qu’il n’y avait pas un artiste qui est plus riche que moi, donc je ne voulais pas de leur argent. Tu m’offres un thé on bavarde et on ne va pas au-delà. L’Etat me paie déjà, donc aucun artiste ne me paiera pour ça. Cependant, je vends mon expertise à qui le veux ?! Que ce soit sur le plan culturel ou pas ; et c’est bien différent en ce moment, car je viens avec mon propre matériel de travail. La culture est d’ailleurs pour moi un hobby.

Cependant, quelle est ton appréciation du show-biz burkinabè ?

Est-ce qu’on peut dire qu’il existe un véritable show-biz au Burkina ? Bref ! Dans mon appréciation, j’irai par étape. D’abord les artistes ; ils ne sont pas professionnels. Beaucoup d’entre eux qui ont atteint un certain stade ne connaissent même pas les journalistes culturels dans les rédactions. Très rarement avant la sortie de leurs œuvres ils ne les approchent pas pour un quelconque accompagnement. Sur plusieurs plans, ils manquent de manières. Quelques-uns qui vivent à l’extérieur sont plus professionnels que le reste dans leurs démarches. Ensuite, les managers ; ils n’arrivent même pas à positionner nos artistes sur le plan international pourtant, on a maintenant de la matière. Quand on se dit manager, on ne peut avoir tout seul plusieurs artistes sous sa coupe. C’est comme vouloir être agent dans plusieurs chaînes de télévision. Je crois qu’ils sont beaucoup plus commerçants que managers. Très rarement quand ils arrivent à faire sortir des artistes du pays, c’est pour aller dans des petits endroits ou seulement aller jouer devant les communautés burkinabè là-bas. A leur retour, c’est pour ensuite inonder les médias avec des images dont on ignore la provenance. Pour ce qui concerne les promoteurs de spectacle, je dirai qu’ils doivent penser tout d’abord à faire la promotion de la musique burkinabè. Très souvent, certains d’entre eux, nous ramènent chaque fois des artistes en fin de carrière de certains pays voisins. Certes, on ne doit pas être fermé, mais il faut donner de la valeur à ce qui se fait chez nous. Aussi, pour certaines manifestations, c’est la presse étrangère qu’ils s’empressent d’envoyer. Il faut toujours avoir une certaine assise avec les médias nationaux pour donner une crédibilité à ce qu’ont fait. Enfin, je parlerai des journalistes. Celui qui conditionne son travail par de l’argent doit s’attendre à certains comportements. En ce moment, il devient vulgaire et il devra s’assumer.

A la dernière édition des Kundé tu étais membre du jury ; comme il fallait s’y attendre, de la salive a coulé par rapport aux lauréats dans certaines catégories ; comment avez-vous travaillez et qu’elle était ton appréciation aux lendemains de l’évènement ?

On s’est retrouvé entre membres du jury avant l’évènement, on a choisi le président, puis on a travaillé dans une bonne ambiance. Il faut noter que les membres du jury ne font qu’homologuer un travail. Plusieurs acteurs culturels font des votes et nous ne faisons que des quotas. Nous avons voté également pour trancher certaines situations. Sachez que même dans les plus grandes manifestations du monde, on ne peut pas trouver toujours l’unanimité pour tout. Mais moi j’étais ravi à l’annonce du Kundé d’or quand le public a acclamé fort. Le jury joue le rôle d’arbitre, mais par moments les fans réagissent sans vraiment d’objectivité.

Parlant d’objectivité, aux lendemains de l’évènement, il est ressorti sur certains réseaux sociaux que pour le lauréat dans la catégorie Espoir, Evariste Combary aurait pesé de son poids pour l’un des candidats, car n’appréciant pas l’artiste Stelbee qui était également dans cette même catégorie. Qu’en est-il exactement ?

(Rires). Je ne la connaissais pas réellement avant les Kundé cette artiste. Je ne l’ai jamais rencontré. D’ailleurs, je vous ai dit plus tôt que je gardais une certaine marge avec les artistes. Contrairement, j’aime bien sa musique et ça pouvait bien être elle également, car elle fait de la bonne musique. Je vous ai aussi dit qu’on homologuait les votes des différents acteurs culturels et je puis vous dire que je n’ai aucun problème avec Stelbee. Il faut que les gens évitent de passionner les débats, car ce n’est pas parce qu’elle n’a pas eu un prix que ça enlève quelque chose à sa valeur. Ce serait vilain qu’un membre d’un jury arrive à un tel comportement.

En tant que journaliste culturel, tu as plusieurs fois participé à des manifestations d’envergure mondiale et tu as été récemment décoré par l’Etat burkinabè ; que peut-on retenir de tout ça ?

Tout d’abord, je crois que tout journaliste doit toujours se remettre en cause dans son travail pour pouvoir continuer d’avancer. C’est vrai que je n’aime pas qu’on m’attache à ce carcan de journaliste culturel, mais c’est un domaine passionnant. Même si dans nos rédactions les gens pensent que ce sont ceux qui n’ont rien dans la tête qui font du journalisme culturel. On a fait les mêmes écoles et c’est tout simplement un choix. Ce que je tiens à dire c’est qu’un journaliste doit se faire respecter dans l’exercice de sa profession peu importe sa spécialité. J’interpelle aussi les autorités à revaloriser le travail des hommes de médias. Quand on chante ou danse nous sommes présents et quand on tire ou qu’il y a des inondations nous sommes également là. Il faut que la presse soit à l’abri du besoin, car un journaliste qui a faim est un journaliste dangereux. Pour ce qui concerne ma décoration je tiens à dire merci au ministre en charge de la Culture pour cette marque. Je n’avais jamais pensé à cela jusqu’au jour où c’est arrivé. J’ai eu des Galian, mais cette distinction m’a énormément touché.

Une adresse particulière…

Tout d’abord, merci à vous et aux Editions Paalga. Je suis content de cette opportunité que vous m’offrez dans votre journal. Beaucoup de gens pensent que le journaliste ne sait que poser des questions, de pareilles occasions sont à renouveler un peu partout pour permettre de le connaître sous une autre facette.

Jérôme William Bationo

24e édition du FESPACO

Sous le sceau de grandes innovations

Le top de départ de la campagne médiatique pour la 24e édition du Festival panafricain du cinéma et de la télévision de Ouagadougou (FESPACO) a été donné au cours d’une conférence de presse le jeudi 31 juillet 2014 à Ouagadougou. A noter, plusieurs innovations, notamment l’introduction du format numérique dans la compétition officielle, pour cette prochaine édition qui se tiendra du 28 février au 7 mars 2015.

Le visuel de la 24e édition du Fespaco

Les éditions se suivent mais ne se ressemblent pas. Introduction de nouvelles technologies, révision de certains critères, une soirée de clôture glamour avec strasses et paillettes, voici autant d’innovations qui sont annoncées pour la 24e édition du Festival panafricain du cinéma et de la télévision de Ouagadougou (FESPACO). Pour le grand rendez-vous de la biennale du cinéma africain qui se tiendra dans le premier trimestre de 2015, il faut s’attendre à bien de nouveautés. Placé sous le thème «Cinéma africain : production et diffusion à l’ère du numérique», le FESPACO 2015 fait corps avec la non moindre importante décision d’ouvrir la compétition officielle au format numérique, a expliqué le Délégué général, Michel Ouédraogo. C’est dans l’optique de rester fidèle à sa volonté de «mettre en exergue les véritables préoccupations des professionnels africains du cinéma» que s’inscrivent ces apports. Il a d’ailleurs rassuré que, pour une meilleure applicabilité de ces innovations, de grandes mesures ont été prises. «Nous avons envoyé un technicien se former sur le numérique à Cannes», a confié le délégué Ouédraogo.

D’ailleurs, en prenant l’exemple sur ce festival, il a fait savoir qu’ailleurs ce sont les journalistes qui montrent aux yeux du monde la valeur qu’a atteinte une manifestation. «Le FESPACO donne de la lumière au continent», et c’est aux différents acteurs de le mettre en épitaphe pour le bonheur du Burkina et de l’Afrique, d’où cet appel qu’il a lancé aux hommes de médias. Toujours dans ce sens, il a indiqué que des voyages dans les grandes capitales africaines et européennes, au Caire, à Lagos, à Bruxelles, à Paris… seront effectués pour la poursuite de la campagne médiatique en vue de solliciter des soutiens et expliquer les innovations de la manifestation.

Sans rougir, Michel Ouédraogo a indiqué que l’évènement a une certaine envergure dans le gotha du cinéma au monde et mérite d’être traité de la sorte. Pour le manifester, à cette édition, la cérémonie de clôture se veut un évènementiel à part entière et se tiendra au Palais des sports de Ouaga 2000. Le tapis rouge sera déroulé et ne pourront prendre part à cette soirée que sur invitation les VIP.

Par ailleurs, il a invité les professionnels du 7e art en Afrique à faire rêver leurs petits frères par leurs œuvres pour leur donner l’envie de faire du cinéma. « C’est un cadre de discussions, de culture et de cinéma. Faisons en sorte que cette rencontre biennale puisse grandir davantage avec la participation des partenaires», a souhaité Michel Ouédraogo.

Le Délégué général du FESPACO, Michel Ouédraogo

Soulignant que 3000 festivaliers sont attendus de par le monde pour cette fête du cinéma, le Délégué général a annoncé que le budget prévisionnel est estimé à 1,2 milliard de F CFA. Jusque-là, son institution n’arrivait à couvrir que 60 à 70% dudit budget et il espère mieux pour 2015.

Une vingtaine de films long métrage seront retenus et l’Egypte est l’invitée d’honneur.

Notons qu’avant d’entamer la rencontre avec la presse, une minute de silence a été observée à la mémoire des victimes du crash de l’avion d’Air Algérie, Bakary Diallo et Lorenzo M’Biahou et pour les cinéastes André Daventure, Alexis Yaméogo, Adama Sallé, disparus récemment.

Créé en 1969, le FESPACO est une manifestation qui réunit depuis lors divers cinéastes et cinéphiles pour la promotion du cinéma africain.

Jérôme William Bationo

Youssef Ouédraogo

«Le show-biz burkinabè est malade de ses hommes»

Il a plusieurs casquettes, notamment celles de critique, de journaliste et de promoteur culturel. Chef des programmes de la radio Jeunesse, dans cette interview qu’il a accordée à l’Obs. Dim le samedi 26 juillet 2014 à Ouagadougou, Youssef Ouédraogo, puisque c’est de lui qu’il s’agit, tire à boulets rouges sur les spéculateurs et revient sur l’origine des FAMA. Il n’a pas manqué non plus d’informer sur les lendemains de l’association des Journalistes et communicateurs pour la Culture (J2C) avant de relever les failles du show-biz burkinabè.


Comment se porte Youssef Ouédraogo ?

Dans mes activités quotidiennes, je vais bien.

Qui es-tu pour ceux qui veulent te connaître davantage ?

Il faut dire que j’ai plusieurs casquettes. Ce qu’il faut retenir c’est que je suis né à la fin des années 70, en Côte d’Ivoire, où j’ai fait mon cursus scolaire avant de rentrer au Burkina après mon baccalauréat. J’ai intégré l’université de Ouagadougou au début des années 2000 d’où j’en suis sorti avec une maîtrise en Lettres modernes. Très tôt j’ai commencé la radio alors que je n’étais qu’étudiant. J’ai été progressivement animateur au niveau de la radio Gambidi, puis stagiaire à Salankoloto, ensuite à la radio Arc-en-ciel et, depuis 2005, j’ai déposé mes valises à la radio Jeunesse où je suis le chef des programmes. J’ai également collaboré avec certains médias, notamment Star Hebdo, L’Obs. Dim et Ouaga Fm. J’ai aussi des tentacules d’entrepreneur avec Radio 21, la première radio en ligne au Burkina, et je suis promoteur d’un évènement, à savoir les Faso music awards (FAMA). Parallèlement à tout cela, je suis enseignant vacataire des lycées et collèges.

Pour ce qui concerne les FAMA, peux-tu présenter davantage cet évènement dont tu es le promoteur ?

Les Faso music awards (FAMA) se sont déroulés du 5 au 7 mars 2014 pour la première édition. C’est un évènement porté à l’origine par l’association des Journalistes et communicateurs pour la Culture (J2C) pour encourager les acteurs culturels qui œuvrent dans l’ombre. J’avoue qu’au début tous n’étaient pas partants pour cette initiative au vu de l’existence d’autres évènements dans le même genre. Mais j’étais de ceux qui ont pensé que trop de viande ne gâtait pas la sauce. Des manifestations dans le domaine existent où l’accent est mis sur l’aboutissement d’un travail accompli. Nous avons donc estimé qu’il fallait voir tous les maillons de la chaîne, à savoir les producteurs, les éditeurs, les managers, les journalistes culturels, etc. En somme, les FAMA mettent un pan sur les professionnels de la filière musique.

Dans cette manifestation, il existe une distinction des artistes ; ce qui n’a pas manqué pour certaines personnes de qualifier cet évènement d’une réplique des Kundé avec juste quelques modifications. Qu’en dis-tu ?


Je vous informe que nous avons pris le soin de faire un toilettage dès le début. Effectivement, à la naissance

du projet, la comparaison a été vite faite avec les Kundé qui existent depuis près de 15 ans. Ce qu’il faut remarquer, c’est que cet évènement récompense exclusivement les artistes musiciens. Comme je l’ai dit plus haut, nous, nous avons pensé à accompagner les oubliés de la chaîne. Cependant, lorsque nous avons primé un artiste comme FAMA de l’année, le bruit a couru que nous sommes un concurrent des Kundé. Ce qu’il faut retenir, c’est que, cette distinction, nous la donnons à une personnalité de la filière, qu’elle soit artiste ou non, qui aurait marqué par son travail et/ou ses résultats tout au cours de l’année. C’est le jury qui a travaillé et qui a jugé. Tous ceux qui portent certains jugements sur les FAMA doivent être patients, car nous ne sommes qu’à la première édition. Il ne faut pas tirer des conclusions hâtives à partir d’un seul fait. Je reconnais qu’au regard des personnes qui ont été distinguées à cette première édition on peut penser à une similitude avec les Kundé, mais nous sommes inscrits dans une démarche et le temps permettra aux uns et aux autres de comprendre davantage. Je tenais à préciser qu’au niveau de la différence, les FAMA sont un festival qui se déroule sur trois jours avec plusieurs activités. Aussi, en termes de perspectives, l’évènement ne va pas élire domicile à Ouagadougou. Nous irons dans les chefs-lieux de région.

Quels sont donc vos rapports avec les organisateurs des Kundé ?

Nous n’avons aucun problème avec les organisateurs de cet évènement. Je vous informe que j’ai plusieurs fois participé aux Kundé en tant que journaliste et, j’ai même eu l’honneur d’être membre du jury de cette manifestation. En aucun moment les organisateurs n’ont voulu saboter les FAMA. Le promoteur a même souhaité la bienvenue à notre bébé dans des interviews qu’il a accordés. Néanmoins je tiens à le dire que le Burkina est dans une dynamique et qu’il ne faudra pas voir d’un mauvais œil si d’autres manifestations de la même nature et du même acabit viennent à se créer. La différence va résider au niveau de l’organisation, et il faut reconnaître que les Kundé ont réussi pour ce qui concerne cela. La beauté du tapis c’est la mosaïque des couleurs, comme le disait Senghor. La force de notre show-biz serait qu’il y ait beaucoup de manifestations. Il ne faut pas embrigader les esprits pour juste un évènement ou bien qu’il faille que l’un cesse pour que l’autre commence. Non ! Cependant, je suis d’accord qu’au vu de l’absence de sponsors, ça risque de plomber certaines manifestations. Mais nous espérons que les politiques permettront d’avoir davantage d’accompagnements.

Certaines personnes réclament la paternité des FAMA ; qu’en est-il exactement pour ce qui concerne l’origine et l’appellation de l’évènement ?

Si vous ne voulez pas qu’il y ait des spéculations sur vous ou sur vos projets, autant être dans le silence et dans l’inertie. Quand on décide d’entreprendre, il faut s’y attendre. Je vous informe donc que tout ce qui se dit ou s’est dit relève de spéculations que certains individus ont voulu dresser devant nous face à notre projet. Nous sommes conscients de cela et nous travaillons à les contrer. Le projet des FAMA est né dès la création de la J2C (Association des Journalistes et communicateurs pour la Culture) ; à l’époque, nous avions un plan d’actions dans lequel étaient inscrites plusieurs activités. Malheureusement, nous n’avons pas pu toutes les réaliser. L’Agora de la musique chaque 21 juin, Bonjour et plein d’autres étaient dans ce plan par exemple. Cependant, il y avait les Burkina show-biz awards qui se tenaient entre-temps, qui ont eu deux éditions. Avant de lancer les FAMA, nous avons entrepris des démarches pour voir dans quelles mesures mutualiser nos forces dans ce sens. Des réunions se sont tenues mais ça n’a abouti à rien. L’opportunité pour organiser les FAMA s’est présentée et nous l’avons saisie. Je suis de ceux qui pensent que chaque génération doit impacter son temps, n’en déplaise à ceux qui polémiquent. Il faut avoir l’honnêteté de reconnaître que, dans ce pays, il y a du mensonge. Nous n’allons pas rentrer dans ces polémiques, nous laisserons les gens nous juger sur le travail.

Que peut-on retenir de cette première édition des FAMA ?

Ç a été accepté par un grand nombre d’acteurs culturels, même si quelques-uns on été réticents. Il était attendu et ça a fait un effet. Nous avons pu mettre également en avant la musique traditionnelle de chez nous et créer une sorte de courroie entre plusieurs acteurs de ce monde de la musique.

En temps que journaliste culturel depuis près d’une décennie, quel regard portes-tu de nos jours sur le secteur de la culture au Burkina ?

Il y a de plus en plus une professionnalisation du secteur avec des associations faîtières dans les différentes filières. Même les plus incrédules commencent à croire que c’est un secteur porteur au même titre que les autres domaines. Avec un apport au PIB, la culture a désormais un autre égard vis-à-vis des décideurs politiques. Aussi, la consommation musicale a évolué au grand bonheur des créateurs. Une salle comme la maison du Peuple ne fait même plus peur aux artistes et ça c’est vraiment intéressant. Tout est à saluer car il y a un travail qui a été fait par les différents acteurs. Je peux dire que le Burkina est sur la bonne voie.

La J2C dont tu es l’un des pères fondateurs est de plus en plus moribonde ; depuis sa création, en 2007, les instances dirigeantes n’ont jusque-là pas été renouvelées malgré le fait que certains membres ne soient même plus en activité, laissant croire à une monopolisation de la structure par quelques individus. Que se passe t-il exactement ?

En lançant par exemple un projet comme les FAMA, notre volonté était de fédérer les journalistes culturels. Lorsqu’on met une association en place et qu’il n’y a pas d’activités, elle finit par mourir. Les associations professionnelles sont différentes des autres formes d’associations au vu du manque de temps des uns et des autres. Ce sont les évènements qui donnent une seconde vie à ces structures en permettant aux adhérents de se rencontrer plus souvent. Malheureusement, au niveau de la J2C, on était en manque d’activités. On est tombé dans une sorte de léthargie. Nous voulons voir maintenant dans quelle mesure revivifier la structure avec les instances à venir et mettre du sang neuf. Nous reconnaissons qu’il y a beaucoup à faire. Je suis l’un des rares membres fondateurs toujours en activité dans le domaine du journalisme culturel. Je pense que l’avenir de la J2C repose sur la nouvelle génération, mais il est bien de préciser qu’il faut un transfert de compétences certes, mais d’une façon progressive. Ce qui est important pour nous qui sommes toujours à la tête de cette structure, c’est de voir dans quelle mesure organiser une assemblée générale et augmenter les activités. Nous promettons que la J2C va redorer son blason et réorganiser ses instances dans les jours à venir.

On dit du show-biz burkinabè une mer agitée où des requins mangent les petits poissons ; qu’est-ce que tu penses de cette assertion et quelle appréciation fais-tu de ce milieu ?


Ce que je retiens c’est que, dans notre show-biz, il y a une sorte de partialisation. Il faut aussi dire que c’est un show-biz embryonnaire du fait qu’il manque certains maillons de la chaîne. Il y a des tendances et des courants qui minent le secteur. J’ai à mon compteur plus de 200 émissions avec les acteurs clés de ce milieu ; et ça m’a permis donc de comprendre qu’il pêche par son manque de solidarité. Entre les acteurs eux-mêmes, beaucoup n’hésitent pas à se mettre les bâtons dans les roues les uns des autres. Aussi, il y a un problème d’audace parce qu’il manque de grandes actions. Le show-biz burkinabè est malade de ses hommes. Ceux qui tiennent le haut n’ont pas travaillé à assainir le milieu pour donner des coudées franches aux jeunes qui arrivent. Ils ont travaillé à créer des dynasties. Si vous n’êtes pas là-dedans vous êtes broyés. C’est un show-biz qui manque d’humanisme et qui a un visage hideux. Du côté des artistes, voyez vous-même le nombre d’associations. Pourtant, ces dernières ont les mêmes objectifs. De nos jours, il y a des artistes de tel ou tel bord. Au niveau des journalistes il y en a qui travaillent pour consolider les dynasties. Ils reçoivent de l’argent pour écrire et mythifier des gens ou pour combattre leurs confrères. Nous avons un milieu qui a besoin d’être assaini. Le show-biz aura une nouvelle vie avec le renouvellement des générations. Je pense que les plus jeunes qui arrivent ont une autre compréhension et pourront apporter beaucoup à ce milieu.

Une adresse particulière…

On dit que le journaliste fait un travail noble en mettant en orbite certaines personnes. Les médias culturels au Burkina ont travaillé à consolider un secteur, mais le regret est que les acteurs culturels n’ont pas un regard bienveillant à l’endroit de ces derniers. Il faut qu’il y ait une bonne collaboration entre les journalistes et les acteurs culturels et éviter les bisbilles inutiles. Pour finir j’adresse mes sincères remerciements au premier responsable de L’Obs. Dim et à tout le personnel qui, avec ce canal, a permis d’apporter un plus au secteur de la culture au Burkina Faso.

Jérôme William Bationo

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